COVID-19 : Le confinement et autres NPI ont-ils servi à quelque chose ? Ben… pas vraiment…

Lors de son audition au Sénat, le docteur Desbiolle avait fait état d’un document concernant l’efficacité des différents NPI (Non-Pharmaceutical Interventions) et des confinements (shelter-in-place-order ou SIPO) sur la mortalité due au Covid-19. Un fidèle lecteur de mon site (merci, Laurent…) m’a fait parvenir celui-ci1.

Les premières études épidémiologiques prévoyaient des effets importants aux NPI. Une étude de simulation de modèle souvent citée par des chercheurs de l’Imperial College de Londres avait même prédit qu’une stratégie basée sur un confinement réduirait la mortalité due au COVID-19 jusqu’à 98 % (comme quoi, les prévisions basées sur des modélisations…).

La réalité, comme on va le voir, est tout autre !

Les auteurs ont donc identifié 18 590 études dont, après moult sélections, il est resté 34 études éligibles à cette méta-analyse.

Concernant le terme de NPI, les auteurs utilisent celui-ci pour décrire tout mandat gouvernemental qui limite directement les possibilités des personnes. Cette définition comprenant les interventions obligatoires telles que la fermeture d’écoles, de bars et restaurants, d’entreprises, les masques faciaux obligatoires, etc.

On notera que les politiques gouvernementales sur les NPIs ont été fortement motivées par les politiques initiées dans les pays voisins plutôt que par la gravité de la pandémie dans leur propre pays. En bref, ce n’est pas la gravité de la pandémie qui motive l’adoption de mesures de confinement, mais plutôt la propension à copier les politiques initiées par les pays proches…

Les auteurs avaient initialement envisagé d’inclure une dimension de qualité pour faire la distinction entre les études basées sur la surmortalité et les études basées sur la mortalité par COVID-19, car ils pensaient que la surmortalité est potentiellement une meilleure mesure pour deux raisons :

  1. Les données sur le nombre total de décès dans un pays sont beaucoup plus précises que les données sur les décès liés au COVID-19, qui peuvent être à la fois sous-déclarés (en raison du manque de tests) ou sur-déclarés (certaines personnes décédant avec – mais pas à cause de – COVID- 19)
  2. L’un des principaux objectifs des confinements est de sauver des vies. Dans la mesure où les confinements déplacent les décès dus au COVID-19 vers d’autres causes (par exemple, le suicide), les estimations basées sur la mortalité due au COVID-19 surestimeront l’effet des confinements. De même, si les confinements sauvent des vies d’autres manières (par exemple, moins d’accidents de la circulation), l’effet des confinements sur la mortalité sera sous-estimé.

Cependant, comme une seule des 34 études reposait sur une surmortalité globale, les auteurs ont été malheureusement contraints de faire abstraction de cette dimension qualitative.

Pour ce qui est des résultats de cette étude, les auteurs ne retrouvent aucune preuve claire que les SIPO (confinements stricts) aient eu un impact notable sur la mortalité liée au COVID-19. Certaines études trouvent une relation négative importante entre les confinements et la mortalité due au COVID-19, mais cela semble être dû à de courtes séries de données qui ne couvrent pas une « vague » complète de COVID-19. Par contre, plusieurs études trouvent une légère relation positive entre les confinements et la mortalité due au COVID-19. Bien que cela semble contre-intuitif, ceci pourrait être dû au fait qu’une personne infectée (asymptomatique) isolée à domicile dans le cadre d’un SIPO peut infecter les membres de sa famille avec une charge virale plus élevée, entraînant une maladie plus grave. L’effet global mesuré par la moyenne est de -2,9 %.

Quant aux NPI, il n’y a aucune preuve d’une relation notable entre les NPI les plus utilisés et la mortalité due au COVID-19. Dans l’ensemble, les fermetures et les limitations des rassemblements semblent augmenter la mortalité par COVID-19, bien que l’effet soit modeste (0,6 % et 1,6 %, respectivement) et les fermetures de frontières ont peu ou pas d’effet sur la mortalité par COVID-19, avec une moyenne pondérée de -0,1 %. Les auteurs ont trouvé quelques effets sur la fermeture des écoles (-4,4 %), mais cette estimation est principalement tirée d’une seule étude qui utilise une « étude de séries chronologiques interrompues » avec des risques de biais tels que les effets saisonniers et comportementaux.

Pour ce qui est du port du masque, il semble avoir un effet important (-21,2 %), mais cette conclusion est basée sur seulement deux études. Il existe des preuves de certitude modérée que le port d’un masque ne fait probablement que peu ou pas de différence sur les résultats des analyses de laboratoire. Cependant, il convient de noter que même si aucun effet n’est trouvé dans des contextes contrôlés, cela n’implique pas nécessairement que les masques faciaux obligatoires ne réduisent pas la mortalité, car d’autres facteurs peuvent jouer un rôle (par exemple, le port d’un masque peut fonctionner comme un frein sur la socialisation si les gens sont gênés par le port d’un masque lorsqu’ils côtoient d’autres personnes).

Seule la fermeture d’entreprise montre systématiquement des preuves d’une relation négative avec la mortalité due au COVID-19, mais la variation de l’effet estimé est importante. Trois études trouvent peu ou pas d’effet, et trois trouvent des effets importants. Deux des effets les plus importants sont liés à la fermeture de bars et de restaurants.

Tous ces maigres résultats seraient expliqués par quatre facteurs :

  1. Les gens réagissent aux dangers proches. Lorsqu’une pandémie fait rage, les gens croient en la distanciation, peu importe ce que le gouvernement impose. La constatation est qu’en moyenne, les changements de comportement volontaires sont 10 fois plus importants que les changements de comportement obligatoires dans la lutte contre le COVID-19.
  2. Les NPI ne réglementent qu’une fraction de nos contacts contagieux potentiels et peuvent difficilement réglementer ni imposer le lavage des mains, la protection vis-à-vis de la toux, la distanciation dans les supermarchés, etc.
  3. Même si les confinements réussissent à réduire initialement la propagation du COVID-19, la réponse comportementale peut contrecarrer complètement l’effet, car les gens réagissent au risque le plus faible en modifiant leur comportement. Si la fermeture des bars et des restaurants fait chuter la prévalence de la maladie vers zéro, la demande d’efforts coûteux de prévention des maladies comme la distanciation sociale et l’accent accru sur l’hygiène également tombe vers zéro, et la maladie reviendra.
  4. Les conséquences imprévues peuvent jouer un rôle plus important que prévu. Comme lors des confinements où une personne infectée à la maison avec sa famille risque d’infecter les membres de la famille avec une charge virale plus élevée, provoquant une maladie plus grave. Il faut y ajouter aussi les fermetures qui ont limité l’accès des personnes à des endroits sûrs (extérieurs) tels que les plages, les parcs et les zoos.

La conclusion de cette étude est donc que les preuves ne confirment absolument pas que les confinements ont un effet significatif sur la réduction de la mortalité due au COVID-19. L’effet est faible, voire nul. Ceux-ci ne sont, de ce fait, pas un moyen efficace de réduire les taux de mortalité pendant une pandémie, du moins pas durant la première vague de la pandémie de COVID-19. Leurs résultats étant conformes à ceux du Groupe de rédaction de l’Organisation mondiale de la Santé (2006), qui a déclaré : « Les rapports sur la pandémie de grippe de 1918 indiquent que les mesures de distanciation sociale n’ont pas arrêté ou réduit la transmission ».

Comme je doute fortement que cette étude arrive un jour jusqu’aux membres de notre gouvernement (et en ce cas, qu’il la prenne en compte…), je suis certain que lors d’une prochaine pandémie, ces derniers auront à cœur de recommencer les mêmes conneries !

 

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