Trial PROSPER

Titre officiel :

Pravastatin in elderly individuals at risk of vascular disease

Date de publication :

19 novembre 2002

Durée :

3 ans

Participants :

Nous avons fait un essai comparatif randomisé dans lequel nous avons attribué 5804 hommes (n = 2804) et femmes (n = 3000) âgés de 70 à 82 ans avec un antécédents ou des facteurs de risque de maladie vasculaire pour un traitement à la pravastatine (40 mg par jour; n = 2891) ou un placebo (n = 2913). Les concentrations de cholestérol de base varient entre 4·0 mmol/L et 9·0 mmol/L. Le suivi était 3,2 ans en moyenne et notre critère d’évaluation principal était l’ensemble des décès coronaire, infarctus du myocarde non fatal et accidents vasculaires cérébraux mortel ou non mortels. L’analyse a été en intention de traiter.

Sponsor :

Bristol-Myers Squibb

Conflits d’intérets :

The authors declare the following arrangements with the sponsoring company or other companies, or both, making competing products. Consultancy agreements: J Shepherd, M B Murphy, I Ford, B M Buckley, S M Cobbe, J W Jukema, C J Packard. Research support, honoraria, travel grants: J Shepherd, G J Blauw, M B Murphy, E L E M Bollen, B M Buckley, S M Cobbe, I Ford, A Gaw, M Hyland, J W Jukema, P W Macfarlane, A E Meinders, J Norrie, C J Packard, D J Stott, R G J Westendorp.

Interventions :

  • 40 mg of PRAVASTATIN (Pravachol)
  • Placebo

Sources :

THE LANCET – Pravastatin in elderly individuals at risk of vascular disease (PROSPER): a randomised controlled trial

Quelques réflexions concernant cette étude clinique :

Malgré une diminution de 34% du cholestérol, la mortalité totale est la même dans les 2 groupes : 306 et 298 décès. Les risques d’infarctus et d’AVC non fatals ne sont pas diminués non plus, ce qui est confirmé dans le rapport : Les événements indésirables graves ont été signalés avec une fréquence similaire dans les deux groupes. Un ou plusieurs événements ont été signalés pour 1604 individus (55 %) sous placebo et pour 1608 (56 %) sous pravastatine
En revanche on note une augmentation significative de la mortalité par AVC et cancers dans le groupe pravastatine.

En fouillant un peu plus :

On relève donc plus de cancers (245 contre 199) et plus de décès par cancer (115 contre 91) chez les patients sous statines. Ce que les auteurs confirment : Les cancers gastro-intestinaux ont été plus fréquents dans le groupe Pravastatine traité (65 cas vs 45 dans le groupe placebo). Dans l’ensemble, il y avait un déséquilibre de nouveau diagnostic de cancer, qui était de 25 % plus fréquentes dans le groupe pravastatine.
Par contre, un peu plus loin les auteurs de l’étude font tous leurs efforts pour minimiser l’augmentation de ces cas de cancer. D’après eux, une meta-analyse (à partir de quelles études ?) a prouvée que cette élévation des cas de cancer est insignifiante… :Pour remettre cette découverte dans le contexte, nous avons fait une méta-analyse des taux de cancer dans les précédentes études contre placebo randomisé,d’une durée de plus de 3 ans et qui ont utilisé la pravastatine ou d’autres statines. Les traitements avec soit la pravastatine (hasard ratio 1·06, 95 % CI 0·96–1·17, p = 0·20) ou toutes les statines confondues (1·02, 0·96–1·09, p = 0·32) n’était pas associée à un excès de cancer. Il n’y n’avait aucune preuve d’hétérogénéité d’augmentation du risque parmi les études de la pravastatine ou globale.
Dommage que tout ceci soit en totale contradiction plusieurs publications postérieures à l’étude PROSPER, dont notamment ce document émis par l’American Association for Cancer Research (AACR) et qui traite justement de l’augmentation des cas de cancer due à la pravastatine[1].
Je me permet de vous en citer la conclusion : Nous émettons l’hypothèse que Pravastatine hydrophile favorise le développement de cancer en causant une augmentation de la synthèse du mévalonate dans les tissus extra-hépatiques. Il est important que les différences dans les propriétés pharmacologiques des statines hydrophile et lipophile soient reconnus lors de l’examen des effets de ces composés, y compris les effets sur les cancers extra-hépatiques. Tenter d’analyser le risque de cancer associé à l’utilisation des statines en effectuant des méta-analyses, dans lequel les essais de pravastatine et les statines lipophiles sont mis en commun ne tient pas compte des différents effets de ces deux classes des statines sur la synthèse du mévalonate extra-hépatiques et, par conséquent, sur un plausible médiateur biologique du risque de cancer. Ce contrôle peut tempérer les conclusions d’un risque qui existe légitimement, ou généraliser et exagérer les risques sans motif. Il y a clairement un besoin urgent de plus amples essais comparatifs individuels des statines avec inclusion de mortalité due au cancer comme un point de terminaison clinique.
De même, pour justifier, dans cette étude, l’augmentation des AVC fatals ainsi que l’inefficacité des statines concernant les AVC non fatals, les auteurs bottent en touche : Les publications récentes suggèrent que les bénéficient des statines concernant les AVC ne commence à apparaître qu’après 3 ans, alors que la réduction du risque coronarien est un événement précoce. Comme par hasard… Je me demande vraiment pourquoi cette étude n’a pourtant pas été prolongée afin de valiser cette hypothèse ! A cause de l’augmentation des cas de cancer ?
Par contre, aucune explication sur l’augmentation tout aussi spectaculaire des décès par « trauma or suicide ». Allez, une explication qui en vaut une autre : peut-être que les personnes sous placebo ont une meilleure qualité de vie, donc font plus d’activités physiques à risque et sont de ce fait plus sujets aux décès traumatiques ???
Et pour terminer, n’oublions pas les 32% d’augmentation des cas de diabètes dans le groupe prenant des statines…

Efficacité de la statine testée dans le cadre de cette étude :

Résultats de la statine testée sur la mortalité cardiovasculaire et globale :
PRAVASTATINPlaceboEfficacité PRAVASTATIN vs Placebo
Nombre de participants28912913
Nbre%Nbre%% d’efficacité absolue% d’efficacité absolue annuelleNNT(*) annuel
Décès d’origine cardiovasculaire943,25%1224,19%0,94%0,31%320
Décès toutes causes29810,31%30610,50%0,20%0,07%1525

(*)NNT : Number Needed to Treat, c’est à dire le nombre de personnes à traiter (annuellement dans ce tableau) pour éviter un évènement.

Ce qui veut dire qu’annuellement, selon ce test, avec un NNT de 320 et 1525, il a été traité inutilement 99,69% et 99,93% des patients respectivement.

En conclusion :

Il faut donc retenir de cette étude concernant l’effet des statines chez les personnes âgées que celles-ci n’ont fait preuve strictement d’aucune efficacité en termes de morbidité (la mortalité globale étant semblable dans les deux camps) mais aussi que certains risques sont aggravés par la prise de statines (surtout dans le cas d’association de plusieurs médicaments, ce qui est le cas chez beaucoup de personnes âgées). L’élévation des cas de cancer est de plus un critère important, et ce d’autant plus que les auteurs de cette étude se sont bien gardés d’en étudier l’évolution à plus ou moins long terme !


  1. American Association for Cancer Research – AACR : Statins and Cancer Development

Dernière modification : 2017-11-21