Trial IDEAL

Titre officiel :

High-Dose Atorvastatin vs Usual-Dose Simvastatin for Secondary Prevention After Myocardial Infarction  – The IDEAL Study: A Randomized Controlled Trial

Date de publication :

16 novembre 2005

Durée :

4,8 ans

Participants :

L’étude IDEAL a inclus 8 880 patients âgés de 80 ans ou moins avec des antécédents d’infarctus du myocarde aigu

Sponsor :

Pfizer

Conflits d’intérets :

Dr Pedersen has received consultation fees and speaker’s honoraria from Pfizer,Merck, Merck AG, and AstraZeneca and researchgrants and steering committee fees from Pfizer andMerck. Dr Kastelein has received research grants fromPfizer. Drs Olsson and Holme have received hono-raria from Pfizer as steering committee members. Dr Bendiksen was previously employed by Pfizer Nor-way and has received honoraria from Pfizer as a steer-ing committee member.

Interventions :

  • 80 mg of ATORVASTATIN
  • 20 mg of SIMVASTATIN

Sources :

High-Dose Atorvastatin vs Usual-DoseSimvastatin for Secondary PreventionAfter Myocardial InfarctionThe IDEAL Study: A Randomized Controlled Trial

Quelques réflexions concernant cette étude clinique :

Nous avons donc une étude financée par Pfizer qui cherche à prouver que 80 mg d’Atorvastatine fabriquée par eux et prescrite à haute dose sont forcément plus efficaces que 20 mg de Simvastatine fabriquée par leur concurrent (Sanofi) et prescrite à faible dose. Ce qui, comme on va le voir plus bas, est loin d’être aussi lumineux…

L’étude ne s’est pas effectuée en double aveugle, c’est-à-dire que les patients avaient connaissance de leur traitement. Ce qui favorise l’apparition de biais dans l’étude, bien que les investigateurs s’en défendent.

La liste des exclusions est, comme d’habitude assez impressionnante : Les principaux critères d’exclusion étaient des contre-indications connues aux statines, intolérance à la prise de statines à des doses faibles ou élevées, taux d’enzymes hépatiques plus de 2 fois la limite supérieure de la normale, grossesse ou allaitement, syndrome néphrotique, diabète sucré non-contrôlé, hypothyroïdie non contrôlée, triglycémie plasmatique avec niveaux supérieurs à 600 mg/dL (6,8 mmol/L), insuffisance cardiaque congestive, cardiopathie valvulaire, troubles gastro-intestinaux affectant l’absorption des médicaments, traitement avec d’autres médicaments qui affectent fortement la pharmacocinétique des statines et le traitement avec d’autres les médicaments faisant baisser les lipides. Les Patients traités auparavant avec des statines étaient qualifiés s’ils avaient pas déjà eu une titration à une dose plus élevée que l’équivalent de 20 mg/j de Simvastatine. Autrement dit, bien loin des prescriptions habituelles où l’on donne des statines à haute doses à tout ce qui bouge…

Curieusement, il est stipulé dans l’étude que si, à 24 semaines, le taux de cholestérol total plasmatique était supérieur à 190 mg/dL (5,0 mmol/L), la dose de Simvastatine pourrait être augmentée à 40 mg/j. La dose d’Atorvastatine pourrait aussi être diminué à 40 mg/j en cas d’évènements indésirables. De la même manière, si le LDL-C a diminué en dessous de 39 mg/dL (1,0 mmol/L), une réduction de la dose de statines pourrait être envisagée. À la fin de l’étude, 1 034 (23 %) se sont vu prescrire de la Simvastatine, à raison de 40 mg/j. Chez les patients à qui l’on avait prescrit de l’Atorvastatine, 80 mg/j, 250 (6 %) ont vu leur dose réduite à 40 mg/j en 24 semaines ; chez 587 patients (13 %), la dose finale était de 40 mg.
Par contre, il n’est fait mention nulle par dans quelle mesure cela a pu impacter les résultats…

Une des raisons invoquée concernant le manque de résultats positif de cette étude concerne la durée. En effet celle-ci était de 4,8 années, et selon les auteurs de l’étude, alors que le protocole de l’étude prévoyait des critères d’évaluation principaux atteints après une médiane de 5,5 ans. Il est vrai que 7 mois supplémentaires auraient pu changer radicalement non seulement les résultats de l’étude, mais aussi la face du monde…

Effets secondaires indésirables :

Je me permets de vous présenter le tableau présentant les effets secondaires des 2 branches Simvastatine et Atorvastatine, tellement celui-ci est impressionnant…

Effets secondaires constatés dans le cadre ce cette étude :
20 mg Simvastatine80 mg Atorvastatine
Nombre de participants4 4494 439
Nbre%NNH(*)Nbre%NNH(*)
Tout événement indésirable420294,66%1420494,49%1
Tout événement indésirable grave210847,49%2206446,39%2
Tout événement indésirable entraînant l’arrêt définitif du médicament à l’étude1864,19%244269,58%10
Événements indésirables entraînant l’arrêt définitif du médicament à l’étude avec une incidence de 0,5 % dans l’un ou l’autre groupe de traitement
  • Myalgies
511,15%87972,18%46
  • Diarrhées
90,20%493380,85%117
  • Douleurs abdominales
100,23%444370,83%120
  • Nausées
60,14%740220,49%202
Myopathie signalée par un enquêteur110,25%40460,13%742
Rhabdomyolyse rapportée par les enquêteurs (sous-ensemble de la myopathie codée)30,07%148020,04%2225
AST>3*ULN à 2 mesures consécutives20,05%2220180,40%247
ALT>3*ULN à 2 mesures consécutives50,11%888430,97%103
  • NNH(*) : Number Needed to Harm, c’est-à-dire le nombre de personnes qu’il faut traiter annuellement pour observer un évènement négatif (effet indésirable nuisible ou décès) consécutif à l’intervention. Plus le chiffre est petit, plus il signifie que l’apparition de l’effet secondaire est élevé ; à contrario un chiffre élevé indique qu’il faut traiter plus de personnes avant de voir apparaître l’effet secondaire et signifie donc que le produit est moins nocif.
  • AST : aspartate aminotransférase
  • ALT : alanine aminotransférase
  • ULN : limite supérieure de la normale.

Je ne m’étendrai pas sur les évènements indésirables et indésirables graves qui, d’après les auteurs de l’étude ne seraient pas tous dus aux médicaments, pour mettre l’accent sur les pourcentages d’évènements indésirables ayant entraîné l’arrêt du traitement : 5% dans la branche Simvastatine, ce qui est conséquent, et le double (soit 10%) dans la branche Atorvastatine, ce qui est considérable. Les effets secondaires indésirables des statines à haute dose ont donc obligé 1 personne sur 10 à stopper son traitement.

Pour faire le point sur ces effets secondaires indésirables, je vais faire comme les labos et parler en pourcentage relatif pour évoquer l’augmentation de ceux-ci dans la branche statine à haute dose :

  • Augmentation des arrêts dus aux effets indésirables du médicament : 56,34 %
  • Augmentation des Myalgies : 47,42 %
  • Augmentation des Diarrhées : 76,32 %
  • Augmentation des Douleurs abdominales : 72,97 %
  • Augmentation des Nausées : 72,73 %
  • Augmentation des AST : 88,89 %
  • Augmentation des ALT : 88,37 %

Et certains osent encore dire que les statines (même à haute doses) sont bien tolérées et n’ont aucuns effets secondaires…

Efficacité des statines testées dans le cadre de cette étude :

Malgré un niveau de cholestérol beaucoup plus bas dans la branche Atorvastatine (81 mg/dL) que dans la branche Simvastatine (104 mg/dL), les résultats sont loin d’être à la hauteur des espérances de Pfizer, aucun des critères d’évaluation n’ayant atteint un seuil significatif[1].

Résultats des statines testée sur la mortalité cardiovasculaire et globale :
20 mg Simvastatine80 mg AtorvastatineEfficacité 80 mg Atorvastatine vs 20 mg Simvastatine
Nombre de participants4 4494 439
Nbre%Nbre%% d’efficacité absolue% d’efficacité absolue annuelle
Décès d’origine cardiovasculaire2184,9%2235.0%-0,12%-0,03%
Décès toutes causes3748,41%3668,25%0,16%0,03%

On peut noter une très légère augmentation des décès de cause cardiovasculaire. Un comble alors que les statines à haute doses sont censées faire baisser ceux-ci…

Concernant les autres critères, il y aurait une légère baisse concernant les hospitalisations pour angors instables (0,76 % annuels) ainsi que pour les revascularisations coronaires (0,74 % annuels). Les autres critères ne présentant pas de différences significatives.

En conclusion :

SI l’on regarde la conclusion officielle de l’étude, la première partie se suffit à elle-même : Dans cette étude chez des patients ayant déjà eu un IM, une baisse intensive du LDL-C n’a pas entraîné de réduction significative du critère de jugement principal des événements coronariens majeurs, mais a réduit le risque d’autres critères d’évaluation secondaires composites et MI. Il n’y avait aucune différence dans la mortalité cardiovasculaire ou toutes causes confondues.

Par contre, la deuxième partie est carrément mensongère si l’on considère l’augmentation (certes non-significative) de la mortalité cardiovasculaire, l’augmentation plus que conséquente de certains effets secondaires ainsi qu’un doublement des abandons de l’étude dus, justement, à des effets secondaires indésirables graves : Les patients avec IM peuvent bénéficier d’une réduction intensive du LDL-C sans augmentation de la non mortalité cardiovasculaire ou autres effets indésirables graves..

 

  1. Jama :High-Dose Statins and the IDEAL Study

Dernière modification : 2021-02-22